portrait d'UN BARON français

ayant œuvré pour le dialogue des cultures

 

 

 

 

« De tes précieux bienfaits les Arts et les Lettres se souviennent,

Et des larmes sont versées à ta mémoire par la musique arabe.

Par tes soins, elle renaît, immortelle, et embellit de sa parure les siècles ;

Baron, tu as tourné le dos à la vie, et, t’élevant dans le ciel, tu as disparu.

Ton souvenir sera gravé dans notre mémoire,

et nous le perpétuerons comme un devoir ;

C’est là un témoignage de la fidélité de l’Art

à son Père Spirituel. »  

 

( Poème traduit en français parMoncef  MEJDOUB / TUNISIE )

 

 

PIERRE TOMBALE DU BARON D’ERLANGER

A sa mort, les artistes tunisiens ont fait inscrire sur sa pierre tombale

un témoignage de reconnaissance sous forme de poème en arabe :

 

 

 

Ce poème, traduit de l'arabe, constitue le témoignage de reconnaissance de l’Association de la Musique Tunisienne qu’on peut lire sur la pierre tombale du Baron d’Erlanger, décédé à Tunis le 29 octobre de l’année 1932 à l’âge de soixante ans.

Le Baron Rodolphe d’Erlanger, né le 7 juin 1872 à Boulogne, dans une famille de riches banquiers, passe les vingt dernières années de sa vie à Sidi Bou Saïd ( le nom de cette bourgade aux environs de Tunis serait celui d’un marabout marocain installé en Tunisie ). D’Erlanger fait construire à Sidi Bou Saïd un palais selon les normes de l’architecture andalouse – avec notamment la participation d’ouvriers marocains- et il appelle son palais Ennejma Ezzohra : "l’Etoile de Vénus". Dans ce lieu prestigieux, d’Erlanger s’adonne à la peinture ( précisément, en tant que portraitiste orientaliste ), s’entoure de musiciens de l’époque, d’origines diverses, s’initie à la cithare sur table ( le qanoûn ) ; il s’intéresse également aux traités musicaux arabes du Moyen-Âge et finit par entamer son projet colossale qui prévoit, entre autres, la traduction de ces traités en français, la collecte et la transcription des répertoires musicaux de son époque ; ses travaux et son intérêt pour la musique sont d’une importance telle que Farouk, le roi égyptien de l’époque, le charge de la préparation du Ier Congrès de la musique arabe, qui se tient du 28 mars au 3 avril 1932. D’Erlanger y travaille avec l’aide de musiciens tunisiens et proche-orientaux, ainsi que du Baron, arabisant, Carra De Vaux. Malheureusement, sa santé ne lui permet pas de se rendre au Caire pour participer au Congrès et décède le 29 octobre de la même année.

Grâce à ses collaborateurs, notamment, son secrétaire Mannoubî Snoussî, le musicologue Henri George Farmer, le Baron Carra De Vaux, le Syrien Alî Darwîsh et le Tunisien Ahmed al-Wâfi, six tomes sur la musique arabe vont voir le jour : le premier est publié du vivant de son auteur ( en 1930 ), les cinq autres, respectivement, en 1935, 1938, 1939, 1949 et 1959.

Les travaux de d’Erlanger constituent une source d’informations incontournable pour les musiciens et les chercheurs ; le Congrès du Caire, dont d’Erlanger a été la cheville ouvrière, a réuni des musiciens d’origines diverses, notamment des Occidentaux, comme Bartok et Hindemith,…et le Turc Raoûf Yekta.Tous ont travaillé côte à côte pour  consigner et appeler à la préservation d’un patrimoine qui, en définitive, appartient à l’Humanité tout entière, un patrimoine auquel ont participé aussi bien les Grecs que les Indiens, les Perses et les Arabes, et dont les musiciens et poètes européens du Moyen-Âge à l’époque de l’Espagne andalouse se seraient inspirés ; à savoir : les Troubadours, puis les Trouvères et les Minnesänger.

 

Partant du fait que le baron d'Erlanger symbolise l'ouverture d'esprit et le dialogue des cultures, un atelier de musique vandopérien est né, en 1994, pour promouvoir les répertoires musicaux du pourtour méditerranéen, en y accueillant un public aux origines diverses.

BENTARA Faouzi

 

 

 

BIBLIOGRAPHIE

 

 

Le Baron Rodolphe D’Erlanger (1872-1932) :

 

Mécène français ayant passé les vingt dernières années de sa vie à Sidi Bou Saïd en Tunisie, d’où il a contribué aux actions entreprises, dans le monde arabe et ailleurs, en faveur de la préservation et de la renaissance de la musique arabe. Sa contribution s’est concrétisée notamment par l’élaboration de six volumes sur cette musique et de l’organisation du premier Congrès de la musique arabe au Caire, en 1932.

 

Les 6  tomes portent les sous-titres suivants :

 

-         Le tome 1 : Al-Fârâbî : Grand Traité de la Musique / Kitâbu l-Mûsîqî al- Kabîr, Livres I et II,

-         Le tome 2 : Al-Fârâbî : Suite : Livre III  et Avicenne : Mathématiques / Kitâbu’ š-šifâ’

-         Le tome 3 : Safiyu-d-Dîn al-Urmawî / Epître à Šarafu-d-Dîn / Aš-šarafiyyah   et le Livre des Cycles musicaux  /  Kitâb al-adwâr,

-         Le tome 4 : Traité anonyme dédié au Sultan Osmânlî Muhammad II  ( Xve s. )   et    Al-Lâdhiqî : Traité al-Fathiyah  ( XVIe s. ),

-         Le tome 5 : Essai de codification des règles usuelles de la musique arabe moderne / Echelle générale des sons  et  Système modal,

-         Le tome 6 : Essai de codification des règles usuelles  de la musique arabe moderne / Système rythmique et Formes de composition.

 

       

Les 6 tomes consacrés à « La musique arabe » ont été réédités, en juillet 2001, par :  

 

 

-         La Librairie Orientaliste :  Paul GEUTHNER, Paris, 

-         L’Institut du Monde Arabe, Paris,   avec le concours du

-         Centre National du Livre.

 

 

Le premier tome contient une Préface de 34 pages

par Christian Poché, datée de février 2001 et

intitulée :

Le baron Rodolphe d'Erlanger

Le mécène, l'artiste et le savant

autres thèmes traités avec les sous-titres suivants :

  1. Le Congrès de musique arabe ( le Caire 1932 )

  2. Les deux barons : d'Erlanger et Carra de Vaux

  3. Le baron  d'Erlanger et Henri George Farmer

  4. Les Tomes V et VI de la Musique arabe

  5. 'Alî Darwîsh ( 1884-1952)

  6. Alexandre Chalfoun ( Iskandar Shalfûn ) ( 1881-1934 )

  7. Manoubi Snoussi ( Al-Manûbî Al-Sanûsî ) ( 1901-1966 )

  8. L'état présent de la publication des traités 

suivie d'une BIBLIOGRAPHIE consacrée exclusivement aux oeuvres publiées au 20e siècle jusqu'à 2001

 

 

 

L’année 2002

 

 

-         130e  anniversaire du Baron Rodolphe D’Erlanger

-         70 ans se sont écoulés depuis son décès : le 29 octobre 1932

 

 

 

 

 

 

Le projet initial du Baron d'Erlanger

 

Ø Collecter la musique populaire dans son ensemble d'une manière plus scientifique que celle effectuée par Sadok Rezgui* dont le manuscrit venait d'être achevé.

Ø Collecter la musique arabo-andalouse, puis transcrire chacune des noubas.

Ø Établir une étude comparative entre les noubas et la musique persane.

Ø Enfin, déchiffrer la problématique technique du Kitâb al-Aghânî d'Abû al-Faraj al-Asfahânî**

---------

*    Sadok Rezgui : Les chants tunisiens ( achevé en 1917, publié en 1967 )

** Al-Asfahâni ( Ispahan 897- Bagdad 967 ) : Kitâb al-Aghânî ( "Livre des chants" en 24 tomes)

 

***

 

L'oeuvre de d'Erlanger devait totaliser 7 tomes ( au lieu des 6 parus à ce jour ).

Christian Poché :

C'est ainsi que d'Erlanger résume le sommaire du tome VII :

Ø Musique primitive

Ø Chants sur les trois degrés de la lyre sacrée

Ø Chants sur quatre, cinq, six degrés de la gamme pentatonique

Ø Musique hébraïque : gamme "astrale"

Ø Les six "mawajib" ( ou lois )

Ø Déclamation des Mu'allaqât ( poèmes antéislamiques )

Ø Chant en souvenir du Prophète

Ø Chants empruntés aux Byzantins

Ø Chants de l'époque abbasside

Ø Chants de l'époque musulmane

Ø La musique religieuse en Afrique du Nord

Ø La musique moderne dans le monde arabe, oriental et occidental, etc…

Et Christian Poché d'observer :

Ce plan, le troisième imprimé par l'éditeur dans son catalogue, sera littéralement balayé : c'est qu'entre temps la préparation du fameux Congrès du Caire de 1932 devient la préoccupation majeure de la vie musicale dans le monde arabe.

Source :

R d'Erlanger : la musique arabe, Tome 1 – préface datée de février 2001, par Christian Poché  ( musicologue contemporain ) , pages 10 et 12